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Dans la continuité des lois de désoviétisation engagées il y a un peu de moins de dix ans, après l’annexion illégale de la Crimée et l’intervention russe dans le Donbas, l’Ukraine poursuit cette voie en démantelant partiellement l’imposante Statue de la Mère Patrie érigée en 1981 à Kiyv en mémoire de la Seconde guerre mondiale.

Partiellement car le démantèlement porte uniquement sur le bouclier et les symboles d’armoirie soviétique, la faucille et le marteau.

Ce démantèlement a fait l’objet de débats en Ukraine, tergiversations et consultations citoyennes de longue date…

Fallait-il démanteler la statue dans son intégralité ? La remplacer ? Seulement le bouclier ? La conserver tel quel en mémoire du passé ? ..etc.

Et plus récemment une petite « polémique » interne dans l’opinion publique, notamment sur les réseaux sociaux (pas surprenant..) car il en faut toujours comme dans toute démocratie qui se respecte..l’interrogation portait sur la temporalité de ce démantèlement vis-à-vis des coûts engagés au regard des priorités d’un pays en guerre.. (28’000 000 uah soit environ 690’000 euros)

Les mauvaises langues diront que l’argent provient de l’aide occidentale, en réalité, il s’agit d’un soutien financier de mécènes et de grandes entreprises en Ukraine.

Quoi qu’il en soit, la population était favorable à plus de 85% pour entamer ce processus et aujourd’hui 6 août 2023, c’est chose faite.

La Mère Patrie, qui devrait dorénavant s’appeler Ukraine Mère, brandit à présent un bouclier muni du symbole du Trident, emblème étatique de l’Ukraine depuis 1991, déjà utilisé lors de son indépendance de 1917. Il est un très ancien emblème remontant au XIIe siècle, dont la signification a souvent été interprété comme le symbole du pouvoir, mais parfois aussi religieux et militaire.

Cependant, on peut aussi lire dans ce blason, les quatre lettres cyrilliques du mot воля (prononcé vola), qui signifie littéralement la « volonté », ou « liberté ».

Sculpteur du bouclier Oleksiï Pergamenchtchyk

En Ukraine, on s’amuse de la comparaison symbolique avec la statue du (presque) même nom, « La Mère Patrie appelle », située en Russie à Volgograd (anciennement Stalingrad) en commémoration de la bataille de Stalingrad et réalisée par le même sculpteur Evgueni Voutchetitch.

Elle symbolise l’image d’une patrie appelant à repousser l’agresseur, l’Allemagne Nazi en l’occurence.

Mais pour les Ukrainiens, en guerre contre l’agresseur russe, elle prend une autre dimension, car comme en témoigne les photos ci-dessous, si la Mère Patrie Ukrainienne représente une femme sereine, regardant vers l’Est, faisant face à la Russie et tenant de manière dissuasive une épée dans sa main droite, qu’elle ne dirige vers personne, mais prête à en user si nécessaire, de sa main gauche, elle brandit un bouclier caractérisant la défense, celle de son pays, de son peuple!

Au contraire, à Volgograd, les Ukrainiens y voient l’expression d’une intention belliqueuse, à l’allure effrayante, brandissant une épée de sa main droite, cette fois sans bouclier comme pour caractériser un acte offensif, et semblant tenter par sa main gauche et l’expression de son visage de lancer un appel à la suivre et à entrer en guerre contre l’Ouest vers lequel elle est tournée..

C’est de bonne guerre…chacun y verra ce qu’il veut y voir.

Quid des réactions à l’Ouest ?

Sans surprise, globalement, un soutien aux Ukrainiens dans leur quête d’émancipation de leur passé soviétique douloureux, et donc une désoviétisation compréhensive et bienvenue.

Mais bien entendu, il existe toujours un courant de pensée défavorable, sans même l’identifier aux seuls pro-russes pour lesquels cette actualité est scandaleuse évidemment.

Non, il s’agit de ce courant idéologique totalement ignorant de l’histoire de l’Europe de l’Est, celle qui regarde encore « affectueusement » le communisme comme le libérateur du joug nazi en Europe.

Cette bien-pensance dont la seule grille de lecture du monde et du passé réside à travers son prisme d’occidental, et qui conduit inexorablement celui-ci a s’indigner de ce que le « reste du monde » ne se préoccupe pas de ses seules blessures morales.

Toute personne ayant en tête à la lecture de ses quelques lignes des noms comme A.Klarsfeld par exemple comprendront de quoi il est question.

Alors d’un ton suffisant, ils diront simplement « A quoi bon retirer toutes les manifestations du communisme ? » cela fait partie de l’histoire..

La réponse à cette question/affirmation n’en amène qu’une autre assez évidente..« Fallait-il alors autoriser les manifestations du nazisme en Europe, la croix gammée aurait-elle encore sa place sur les monuments Européens ? »

« Oui mais non..ce n’est pas pareil »…

Evidemment..

C’est parfaitement semblable justement, et on devrait se rappeler un peu plus souvent que le communisme a fait bien plus de victimes que le nazisme, et qu’il continu de faire des victimes..

« Le communisme, c’est le nazisme, le mensonge en plus » J.F Revel

C’est ce qu’on appelle couramment l’indignation à géométrie variable.