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Crimée – Ukraine

Erigée en symbole, la sphère propagandiste du Kremlin le répète à qui veut bien l’entendre, la Crimée est Russe, et elle l’a toujours été !

Pas si simple..

Le but de l’article néanmoins ne sera pas de vous compter l’origine de la Crimée mais de comprendre son rapport avec l’Empire Russe et l’Ukraine.

Il semble toutefois inévitable de rappeler quelques faits historiques notables à son sujet pour donner un contexte et en quelque sorte tracer une ligne de départ pour répondre à la question « A qui appartient la Crimée ? »

Mais rappelons d’abord ce qu’est la Crimée ?

La Crimée est une péninsule de 27’000km2 directement reliée au Sud de l’Ukraine par l’isthme de Perekop, elle s’avance vers la Mer Noire qu’elle sépare de la Mer d’Azov. Elle est réputée entre autres pour son climat et ses stations balnéaires.

Elle a accueilli la célèbre conférence de Yalta en 1945 qui devait préciser les termes du partage de l’Europe entre les dirigeants alliés , Churchill, Roosevelt et Staline.

Sa capitale est Simféropol.

Lors du recensement de 2001, sa population comptait ~2M d’habitants, en 2014 (sous occupation russe), ~2.3M d’habitants.

Histoire (courte) de la Crimée : Avant l’Empire Russe

La Crimée Antique portait le nom « Chersonèse taurique », du nom d’un peuple antique, les Taures, qui étaient installés sur la côte méridionale de la péninsule de Crimée.

Puis elle a été occupée par diverses ethnies à travers les époques.

Les Cimmériens, les Scythes, les Romains, les Goths, les Grecs, les Huns, puis les Bulgares, le peuple Khazars, les Pétchénègues, les Slaves, les Mongols, les Coumans, les Russes, les Ottomans, etc.

La Crimée a donc successivement appartenu à différentes civilisations pendant au moins 10 siècles.

On peut donc déjà réfuter l’idée émise par la propagande russe que la Crimée a toujours appartenue à la Russie..

Mais, ne nous arrêtons pas en si bon chemin et poursuivons pour comprendre son rattachement à l’Empire Russe en 1783 puis en 1954 à la République Socialiste Soviétique d’Ukraine.

Pour cela il faut faire un petit retour en arrière, après l’invasion Mongols des troupes de Gengis Khan et la peste noire de 1347-1352 qui fera des millions de morts un peu partout et la Crimée n’y échappera pas.

Les peuples Slaves et les Tatars de Crimée deviendront les groupes ethniques majoritaires de la péninsule.

 

Khanat de Crimée [1441-1783]

Khanat de Crimée vers 1600

Les Tatars de Crimée sont un peuple de Turcs qui bâtirent un khanat indépendant sous la protection de l’Empire Ottoman à qui ils firent allégeance. Ils avaient leurs propres coutumes et leur propre langue et régnaient en maitre sur le territoire.

Ils finiront par intégrer pleinement l’Empire Ottoman au XVIème siècle. La population se convertie à l’Islam et devint progressivement turcophone.

Crimée sous l’Empire russe [1783-1991] dont 1954-1991 dans RSS d’Ukraine sous URSS

Après la guerre russo-turque, [1768-1774] l’Impératrice Catherine II annexe la Crimée en 1783. Traité d’Iași

D’emblée, elle y fonda le port de Sébastopol et mènera une politique de peuplement par des chrétiens, Russes et Ukrainiens, mais aussi des Allemands, des Moldaves, des Arméniens et des Grecs.

De nouvelles villes furent fondées. (Odessa, Simféropol, Mélitopol, etc.)

Les Tatars de Crimée devinrent minoritaires et firent persécutés ou expulsés jusqu’à la fin du XIXème siècle.

La démographie de la péninsule changea du tout au tout : 13% de Tatares, 17% de divers peuples, 28% de Russes et 42% d’Ukrainiens.

De 1853 à 1856, une guerre éclate sur la péninsule qui oppose la Russie aux Turcs et leurs alliés, la France et le Royaume-Uni.Les Russes perdront cette bataille mais leur défaite n’entrainera aucun changement territorial en Crimée.

Ainsi et alors qu’au milieu du XVIIe siècle les Tatars représentaient 90% de la population, fin XIX, ils ne sont plus que 35%.

La Crimée se relèvera dans les années 1860 après avoir été lourdement affectée par le conflit. Ce sera l’émergence de nombreuses stations balnéaires comme Yalta.

Après la Révolution Russe de 1917, la Crimée se constitue, en 1921, République Socialiste Soviétique autonome de Crimée au sein de l’URSS.

Les Tatars tentent de reprendre une place importante, notamment du point de vue politique mais le pouvoir soviétique ne le tolérera pas et dès 1928, les persécutions reprirent, plusieurs dizaines de milliers de Tatars seront déportés ou emprisonnés.

A l’image de la politique de russification menée en Ukraine sous domination de l’Empire Russe, l’étude et l’enseignement de la langue Tatar ainsi que les livres seront interdits.

Pendant la Seconde guerre mondiale, la péninsule est occupée par l’Allemagne après les batailles entre la Wermacht et l’Armée rouge.

A la fin de la guerre, en 1944, la Crimée est reconquise et les Russes accusent les Tatars d’avoir collaboré avec l’Allemagne nazis. Ils en paieront le prix par la déportation de plus de 200 000 Tatars dans des conditions inhumaines et plus de la moitié d’entre eux mourront.

Staline ordonnera un décret (L.5859) au sujet des Tatars.

« Tous les Tatars doivent être expulsés du territoire de la Crimée et installés à titre de colons spéciaux dans les régions de la République socialiste soviétique d’Ouzbékistan. »

La RSS autonome de Crimée sera abolie en 1946 et sera repeuplé de Russes dans une nouvelle campagne de russification.

Crimée sous RSS d’Ukraine [1954-1991] dans l’URSS

Nikita Khrouchtchev, alors nouveau président de l’URSS dénoncera les persécutions et la déportation du peuple Tatar par son prédécesseur mais néanmoins, aucun des déportés ne sera autorisé à revenir en Crimée.

Transfert de la Crimée en Ukraine

Transfert de l’Oblast de Crimée
de la RSFSR à la RSSU

En 1954, la Crimée sera transférée par Nikita Khrouchtchev à l’Ukraine à l’occasion du tricentenaire du traité de Pereïaslav.

Outre le consensus qui accorde ce transfert comme un cadeau de la Russie à l’Ukraine, certaines sources indiquent néanmoins une vision quelque peu différente.

« En réalité, le transfert de la Crimée à cette époque chargeait l’Ukraine de tous les problèmes économiques et politiques de la péninsule, détruite pendant la guerre et privée de nombreux habitants, du fait que Staline avait ordonné la déportation des Tatars de Crimée vers le Kazakhstan lointain en 1945. La situation économique dans la péninsule au cours de cette décennie était désastreuse et les habitants étaient extrêmement mécontents et révoltés. Nikita Khrouchtchev se débarrassait d’un fardeau dont personne ne voulait. C’était « une poupée cassée», selon Leonid Kravtchouk, qui sera président de l’Ukraine de 1991 à 1994. » Indique le professeur et sociolinguiste Jacques Leclerc avant de poursuivre :

« L’objectif de Khrouchtchev était de donner un petit territoire à l’Ukraine afin de d’obtenir quelque chose en retour. Le but était de lier plus étroitement l’Ukraine à la Russie, parce que pendant la guerre les habitants de cette république soviétique n’avaient pas soutenu entièrement l’Armée rouge. Le transfert fut également fait pour consolider la domination des deux grandes républiques slaves de l’Empire soviétique (Russie et Ukraine), en les opposant aux régions problématiques du Sud, qui comprenaient également la Crimée avec les Tatars habitant la péninsule. De plus, selon le premier président ukrainien (1990-1994), Leonid Kravtchouk, dans une interview accordée en mai 2019 au journal ukrainien Apostrof, Nikita Khrouchtchev aurait contraint la RSS d’Ukraine à accepter la Crimée, parce que Moscou ne pouvait pas la soutenir : « Vy dolzhny zabrat’ Krym, Rossiya ne mozhet s nim spravit’sya» («Vous devez prendre la Crimée, la Russie ne peut pas la soutenir»). La Crimée avait appartenu à la Russie pendant 170 ans. Par la suite, selon l’ancien président Kravtchouk, l’Ukraine avait dû dépenser l’équivalent de 110 milliards de dollars US pour maintenir la Crimée à flot au point de vue économique. »

Ce rattachement à l’Ukraine semble donc plus découlé d’un raisonnement purement pragmatique et économique. Cette affiliation permettait en outre la fourniture en eau et en électricité par l’Ukraine par l’istme de Perekop lorsque la Russie n’est pas rattachée par la terre directement à celle-ci rendant difficile son développement économique.

Cela donne un autre regard sur le transfert de la péninsule à l’Ukraine et remet relativement en question l’affirmation prônée par les pro-russes « récupérer ce qui est à nous »

D’ailleurs, en 1991, le président ukrainien, L.Kravchuk, prononcera ses mots s’adressant aux Criméens qui souhaitait faire sécession :

« En 1954, l’Ukraine reçut une poupée cassée. Nous l’avons réparé, et maintenant ils la veulent. »

Retour des Tatars

Dans le contexte de la Perestroïka, dans les années 1980-90, environ 150’000 Tatars reviennent s’installer en Crimée. Ils y subiront de la discrimination de la part du peuple Russe et ne seront pas indemnisés pour les préjudices subis.

La Crimée dans l’Ukraine [1991-2014]

En préambule, rappelons que la relation ukraino-criméenne ne remonte pas à 1991. En 1710 déjà, après que Pierre Ier eut réussi à soumettre l’Ukraine suite à la bataille mené contre l’hetman cosaque I.Mazepa, Pylyp Orlyk, le successeur de Mazepa établira la première constitution ukrainienne dans une alliance anti-moscovite avec les Tatars.

A la faveur de l’effondrement de l’URSS, le Conseil Suprême de la RSS d’Ukraine adopte la « Déclaration de souveraineté de l’Ukraine » le 16 juillet 1990.

Le 24 août 1991, l’Ukraine est proclamée Etat indépendant.

En décembre de la même année, un référendum d’autodétermination a lieu pour répondre à la question :

« Etes-vous favorable à la déclaration d’indépendance de l’Ukraine ? »

Le oui l’emportera à 92,3% pour une participation de 84,18% sur l’ensemble du territoire et la Crimée se prononce à 54% en faveur de cette indépendance, 57% à Sébastopol (plus faibles pourcentages en faveur du oui)

OUI // NON au référendum d’indépendance de l’Ukraine

 

Un mouvement sécessionniste russe, craignant des revendications ukrainiennes et tatars (notamment du fait de la politique de Staline à leurs égards), « conteste » les résultats et proclame l’indépendance de la Crimée.

Tenant compte de ses revendications, la Crimée obtint le statut de République autonome.Le 5 mai 1992, elle proclame son indépendance, mais reste rattachée à l’Ukraine dans le cadre d’un accord entre les deux parlements.

La constitution ukrainienne de 1996 puis sa modification en 1998 fixera les conditions de cette indépendance. (compétences financières, parlement, conseil des ministres, etc.)

Sébastopol aura un statut spécial au sein de l’Etat ukrainien. Le port de Sébastopol devint dans le même temps un sujet entre ukrainiens et russes. En effet, elle abrite la base navale de la mer Noire.

En 1997, un accord est trouvé, 83% de la flotte revient à la Russie et 17% à l’Ukraine qui pourra également faire valoir un « droit de stationnement » (rente) pour une durée de 20 ans ainsi que des conditions avantageuses sur le prix du gaz.

Accord qui sera prolongé jusqu’en 2047 sous le président pro-russe V. Ianoukovitch dès 2010 après sa volteface faite au peuple dans le cadre des accords économiques avec l’Union Européen, et qui mèneront à Maïdan

Le rattachement de la Crimée à l’Ukraine comme république autonome est officiellement reconnu par la Russie en 1997.

La même année, en mai, sera signé un traité d’amitié, de coopération et de partenariat entre l’Ukraine et la Fédération de Russie qui prévoyait la reconnaissance de l’inviolabilité des frontières et le respect de l’intégrité territoriale et l’engagement mutuel de ne pas utiliser son territoire pour atteinte à la sécurité de l’autre.

Le traité interdit à l’Ukraine et la Russie de s’envahir l’un l’autre et de se déclarer la guerre.

Recensement démographique :

En 2001, les recensements sur la population et la répartition ethnique en Crimée indiquaient :

        • Russes = ~58%
        • Ukrainiens = ~24%
        • Tatars de Crimée = ~12% (à la faveur du nombre massif d’exilés de retour)
        • Autres ethnies = ~5%

En 2018, après son annexion par la Russie, la composition avait déjà bien évolué ( les données sont néanmoins à contextualiser du fait de la guerre en Ukraine, l’annexion illégale de 2014, la pression russe sur les populations minoritaires, etc.)

        • Russes = ~67%
        • Ukrainiens = ~15%
        • Tatars de Crimée = ~10% (à la faveur du nombre massif d’exilés de retour)
        • Autres ethnies = ~6%

Au recensement de 2014 les russophones sont largement représentés par 84,1 %, contre 7,8% pour le tatar de Crimée et 3,2% d’ukrainophones.

L’écart entre la population russe et les russophones s’expliquent par l’adoption du russe comme langue maternelle par les autres groupes ethniques minoritaires. (Russification)

2013 – Opinion publique en Crimée : Très révélateur d’un état d’esprit

Selon l’enquête d’opinion réalisée en 2013, seulement 23% de la population de Crimée se disait favorable au rattachement à la Russie. Pour 53%, la volonté était de garder le même statut.

Ce résultat peut paraitre étonnant pour beaucoup mais il a en réalité beaucoup de sens et fait écho à un biais cognitif que nous dénonçons ci-dessous* à la suite des sondages, et qui laisse supposer que Russophone = Russe = Russophile alors que ce n’est pas le cas.

*Dans l’inconscient des gens, Russe, Russophone, Russophile, ce serait la même chose, mais pas du tout.

      • Russe : Natif de Russie
      • Russophone : Qui parle russe
      • Russophile : Qui est favorable à la Russie

D’autant dans le contexte ukrainien, faire cette différenciation est primordiale.

On ne peut par exemple pas conclure que si l’Est et le Sud du pays sont largement russophones, cela signifierait une adhésion à la Russie, on constate au contraire, qu’une large majorité russophone est favorable à l’Ukraine.

On peut également être Ukrainien et russophone, une importante part des ukrainiens parle russe comme nous le démontrons dans cet article.

Il est également possible d’être ukrainien et russophile, c’est le cas des séparatistes de Donetsk et Louhansk.

Il nous semblait important de faire ce petit point de situation.

Pour poursuivre avec l’opinion publique ukrainien :

A la question : « La propriété foncière est une question très importante en Crimée. De nombreux Tatars de Crimée estiment que le gouvernement devrait leur attribuer des terres pour compenser la déportation. Êtes-vous d’accord ou non avec cette opinion ? »

43% des sondés estiment être en parfait désaccord avec cette affirmation et 28% en certain désaccord. Donc pour 71% de la population, les revendications Tatars ne sont pas légitimes, ce qui confirme la discrimination à leur égard et une certaine négation historique.

2014 – Annexion de la Crimée

En préambule, il est nécessaire de rappeler 2 dates : 5 décembre 1994 et 31 mai 1997

05.12.1994 – Mémorandum de Budapest

 

A la suite de l’effondrement de l’URSS [1991], les Etats-Unis et les autres grandes puissances sont préoccupées par le fait que 4 anciennes républiques socialistes devenues indépendantes possèdent l’arme nucléaire (Russie, Ukraine, Kazakhstan, Biélorussie)

Les Etats-Unis trouveront un accord avec la Russie par lequel l’Ukraine, la Biélorussie et le Kazakhstan devront renoncer à la possession d’armes nucléaires sur leur sol et s’engagent à rejoindre le Traité de non-prolifération des armes nucléaires.

L’Ukraine (déjà clairvoyante et méfiante à juste titre) réclamera également une compensation financière et une garantie de sécurité et de protection de ses frontières.

C’est ainsi que les 3 pays renoncèrent à leur arsenal nucléaire qui sera transféré à la Russie. [Certainement la plus grande erreur que l’Ukraine ai commise à en juger par la situation depuis le 24-02-2022]

Ce mémorandum d’adhésion au Traité de non-prolifération des armes nucléaires sera signé à Budapest le 5 décembre 1994.

En voici les conditions :

«La fédération de Russie, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et les États-Unis d’Amérique réaffirment leur engagement envers l’Ukraine, conformément aux principes énoncés dans l’Acte final de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe, de respecter son indépendance et sa souveraineté ainsi que ses frontières existantes.

  1. La fédération de Russie, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et les États-Unis d’Amérique réaffirment leur obligation de s’abstenir de recourir à la menace ou à l’emploi de la force contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de l’Ukraine, et qu’aucune de leurs armes ne soit utilisée contre l’Ukraine, si ce n’est en légitime défense ou d’une autre manière conforme aux dispositions de la Charte des Nations Unies.

(…)

  1. L’Ukraine, la fédération de Russie, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et les États-Unis d’Amérique se consulteront dans le cas où une question se poserait au sujet des engagements énoncés ci-dessus.

Le présent Mémorandum est applicable dès sa signature. »

Signé en quatre exemplaires faisant également foi en langues ukrainienne, anglaise et russe. Budapest, le 5 décembre 1994

 

31.05.1997 – Traité d’amitié russo-ukrainien

 

Traité d’amitié, de coopération et de partenariat entre l’Ukraine et la Fédération de Russie qui prévoyait la reconnaissance de l’inviolabilité des frontières et le respect de l’intégrité territoriale et l’engagement mutuel de ne pas utiliser son territoire pour atteinte à la sécurité de l’autre.

Le traité interdit à l’Ukraine et la Russie de s’envahir l’un l’autre et de se déclarer la guerre.

Fin février 2014, à l’issue de la Révolution de la Dignité (Maïdan), et après la prise de pouvoir armé du Parlement Criméen par des militaires Russes qui installeront des autorités à la faveur de la Russie (pro-russe) la Crimée proclamera finalement son indépendance le 11 mars 2014.

Le 16 mars, par un tour de magie dont la Russie a le secret, un référendum [pipé] proposant le rattachement de la péninsule à la Fédération de Russie l’emporte à 96,8 % des voix dans un territoire peuplé à 58% par des Russes, 24% par des Ukrainiens et 12% par des Tatars, ces derniers rejetant majoritairement cette annexion fuiront en Ukraine (Lviv) ou ailleurs à la suite d’actions visant à les discriminer et à étouffer toutes contestations.

Pour l’anecdote :

        • Sur une population d’environ 1,9M d’habitants incluant les enfants, les organisateurs ont tiré près de 2,7M de bulletins de vote…soit la possibilité de voter plusieurs fois, de l’extérieur..etc.
        • « Vous voulez la vérité : le referendum c’est une fiction, une formalité. La Crimée sera russe, voilà tout », affirme le Maire d’une ville proche de Simféropol, avant de lancer : « Et s’il n’y pas assez de voix, il y aura des fraudes massives »
        • Le drapeau russe flottait déjà sur l’édifice du parlement de la Crimée le jour du référendum.
        • Un homme passe devant une affiche à Sébastopol le 13 mars 2014 indiquant « Le 16 mars, nous choisirons soit… soit… », représentant la Crimée en rouge avec une croix gammée et couverte de barbelés et la Crimée avec les couleurs du drapeau russe.

 

AFP Photo / Viktor Drachev

Le 18 mars 2014, le Parlement Russe confirme le rattachement de la Crimée et de Sébastopol à la Fédération de Russie.

Le 18 mai 2018, Poutine inaugurera en grandes pompes son Pont de 19km reliant la péninsule à la Russie par le Détroit de Kertch.

La Russie s’assure de facto une présence militaire importante dans la mer Noire et un assujettissement à l’Ukraine avec une nouvelle frontière commune.

Quant à l’Ukraine, elle se voit « amputée » d’un territoire de 27’000km2, un accès stratégique à la mer Noire, une partie de sa flotte navale et une baisse considérable de son commerce du fait des restrictions imposées par les gardes-frontières russes et les dimensions du pont construit volontairement avec des dimensions réduites ne permettant pas aux grands navires de passer.

Les Tatars de Crimée ne cesseront pas d’être opprimés avec des mesures liberticides.

Les peuples minoritaires ( Tatars, Ukrainiens..) se verront contraint d’accepter la langue russe comme langue officielle, alors que c’est un des arguments des pro-kremlin qui justifierait l’intervention en Ukraine (Préserver les droits des minorités) Faites ce qu’on dit, mais ne faites pas ce qu’on fait…

L’enseignement en ukrainien dans les écoles ne cessera de diminuer, les chaines de TV, les journaux, la radio sera progressivement interdite.

Toute critique à l’égard du transfert de la Crimée tombe sous le coup de la loi, amende, prison.

Conclusion

La Crimée n’est pas Russe et ne l’a pas toujours été.

Une résolution non contraignante de l’ONU dénonce le référendum Criméen comme invalide à 100 Etats sur 193 dont 58 abstentions, 24 non-votants et 11 contre.

Il est en effet inconstitutionnel au regard du Droit ukrainien qui prévoit l’indivisibilité de son territoire. (inclus la Crimée)

Selon la Charte des Nations Unies, « L’utilisation de la force est permise dans les seuls cas de légitime défense et de décision du Conseil de sécurité. Toute autre mesure est inacceptable et constituerait un acte d’agression »

Or, personne n’était en danger en Crimée avant l’intervention armée des « petits hommes verts » de Poutine dans la péninsule.

La propagande du Kremlin soutenue en Occident par la droite ou l’extrême droite serait de considérer qu’il y a « jurisprudence » Dès lors, il faudrait trouver la même issue à la Crimée qu’au Kosovo par exemple.

Sans rentrer dans le contexte géopolitique du Kosovo pour ne citer que cet exemple, il faudrait d’abord comprendre et reconnaitre des situations différentes mais surtout il faudrait alors faire sa propre introspection pour la Fédération de Russie et reconnaitre la volonté à l’autodétermination de bien des peuples en son sein, à commencer par le peuple Tchétchène.

2022 – La Crimée Ukrainienne

Les dirigeants et le peuple Ukrainien, estiment [de plein droit] et avec beaucoup de conviction que la Crimée est à eux et c’est avec une détermination forte, qu’ils insistent sur le retour de celle-ci à l’Ukraine dans un futur proche.

Résumé

-La Péninsule a connu une alternance ethnique de 10 siècles avant d’être annexée en 1783 par la Russie. Il n’est donc pas exact d’affirmer qu’elle a toujours été Russe

-Historiquement parlant, si on regarde sa plus grande période d’occupation, la Crimée serait Tatar, peuple turco-mongol de confession musulmane

La déportation du peuple Tatar par les Russes a joué un rôle considérable dans la mutation ethnique de la péninsule

-La Crimée passe sous occupation Russe seulement en 1783 avant d’être rattaché à la RSS d’Ukraine en 1954 puis indépendante en 1991 soit 171 ans sous l’influence Russe. (208 ans au total)

-Le transfert de la Crimée à l’Ukraine était un geste politique visant à transmettre la reconstruction économique de la péninsule et non pas un cadeau pour sceller l’amitié russo-ukrainien

L’idée de reprendre quelque chose qu’on a donné à quelqu’un après que ce dernier l’a entretenu et développé est antonyme à la notion de « cadeau »

-La Russie a violé plusieurs lois/traités en annexant la Crimée

    • Mémorandum de Budapest- 1994
    • Traité d’amitié russo-ukrainien – 1997

-Le référendum organisé en Crimée est inconstitutionnel au regard du Droit ukrainien

Il est également illégitime du point de vu de son organisation [sous occupation militaire ; non libre et secret ; sous influence ; pas d’observateur international, etc.]

-Être russe ou russophone ne signifie pas être russophile

En 2013, seulement 23% de la population de Crimée se disait favorable au rattachement à la Russie